«
Bien entendu, on peut sauter sur sa chaise comme un cabri en disant
"l’Europe !", "l’Europe !", "l’Europe
!", mais cela n’aboutit à rien et cela ne signifie rien.
» (Charles
de Gaulle, Discours et messages)
La
sentence gaullienne a frappé les esprits. Elle a visé juste jusqu’à
aujourd’hui. Mais, n’est-ce pas faute d’avoir abandonné
notre communauté de destin, l’Europe, aux mains des
seuls politiciens et des eurocrates ?
L’Europe
n’appartient-elle pas d’abord aux Européens ? Comment, dans le
même temps, peut-on laisser certains expliquer que l’Europe
est la cause de tous nos maux alors que l’idée européenne
est la solution face à la mondialisation ?
Des
Thermopyles au Traité de Rome, des tranchées de Verdun aux travées
du Parlement Européen à Strasbourg, les Européens ont su
résister, dépasser leurs querelles, créer, et innover.
Et
si la prochaine innovation était institutionnelle ?
Et
si l’on construisait enfin l’Europe, une autre Europe, notre
Europe ?
Face
à la crise, et contre les fauteurs de décadence.
Naturellement
engluée dans un brouillard libéral et mondialiste, l’Europe
navigue à vue.
Face
au monde multipolaire qui se dessine, et comme à chaque rendez-vous
avec l’Histoire, l’Europe devra choisir entre la puissance ou la
mort.
La
mort, c’est subir la crise, accepter le déclin, décourager ses
forces vives et laisser fuir sa jeunesse pour ne devenir qu’une
ombre de ce que les Américains appellent déjà « la vieille Europe
», celle des musées, des maisons de retraite et des souvenirs.
La
puissance, c’est envisager le renouveau, le dépassement des
États-Nations, la construction d’un État européen volontariste
et pragmatique. Fédéral et régional, afin de respecter et
de protéger la diversité culturelle des peuples européens, il
se doit d’être en mesure de répondre aux attentes sociales des
populations. Fort et puissant afin de promouvoir et de défendre, au
delà de toute idéologie, les intérêts matériels et
immatériels, les valeurs et les traditions culturelles des
Européens, il doit oser rayonner à travers le monde.
Cri
d’alarme et cri du coeur, ce livre appelle à un élan collectif
vers un État européen, un Etat d’urgence ! Il est temps que le
cabri se fasse loup !
***
Gérard
DUSSOUY (1945)
est Professeur émérite à l’Université Montesquieu de Bordeaux
4, où il reste membre du Centre Montesquieu de Recherche Politique
(CMRP).Il a passé plus de quarante ans dans l’Education Nationale,
au service de l’Etat français.
Ses
travaux portent sur l’épistémologie de la géopolitique et des
relations internationales, et sur la théorisation de la mondialité.
Sa formation universitaire pluridisciplinaire, d’économiste
(doctorat de Spécialité en Sciences économiques) de géographe
(agrégation), de politologue (doctorat d’Etat en Science
politique), l’a conduit à proposer une reconceptualisation
systémique de la géopolitique et des relations internationales.
Elle relève de l’épistémologie néo-pragmatiste qui se
revendique contextualiste et anti-essentialiste, inter-ethnocentrique
et non universaliste, et qui défend une conception stratégiste des
valeurs. Elle l’a mené à faire une approche multidimensionnelle
et interactionnelle du monde qui rompt avec les analyses
catégorielles et positivistes de l’espace universitaire français.
Européen
convaincu depuis toujours, mais réticent à tout engagement face au
spectacle donné par le personnel politique français, toutes
tendances confondues, Gérard Dussouy s’interroge avec inquiétude,
aujourd’hui, sur le devenir des nations du vieux continent.
Il
a ressenti le besoin de s’exprimer et de lancer un cri d’alarme
quant à leur futur proche. Il voudrait convaincre les citoyens
lucides de toute l’Europe, et de toutes les nationalités, que la
maîtrise de leurs destins respectifs ne passe pas par le rejet de
l’Union européenne, mais par leur prise de pouvoir à Bruxelles et
par l’édification d’un Etat européen au service des peuples qui
voudront le construire. Ce qui exige, dans un premier temps, qu’ils
se rassemblent et qu’ils s’organisent.
***
Préface
du livre, par Dominique VENNER
Quand
l’Europe s’éveillera…
En
France, pays réputé pour être le plus pessimiste d’Europe, on
confond volontiers la souveraineté étatique et l’identité. On
pense que les abandons de souveraineté sont des abandons d’identité.
Pourtant, rien n’est plus faux. La souveraineté n’est pas
l’identité. Les Français sont victimes d’une illusion héritée
d’une vision historique déformée. Contrairement à l’Italie qui
n’eut jamais d’État unitaire avant 1864, ou à la nation
allemande qui s’en est passée pendant six siècles, de 1250 à
1871, la France n’a pas connu de genre d’expérience. Sinon
pendant quelques décennies du XVe siècle, l’État unitaire s’y
est maintenu sans discontinuer, avec des hauts et des bas, depuis la
fin du Moyen Âge. De là une relation causale inscrite dans les
esprits français entre souveraineté et identité. C'est même
devenu une sorte de dogme, entretenu par l'enseignement jacobin de
l'histoire. La nation française serait une création de l'Etat et,
privée de ce dernier, elle serait en péril de mort ou de
dissolution.
Si
cela était, une telle nation ne vaudrait pas cher, ce serait une
coquille vide. Mais c'est faux. Certes, personne ne contestera que
l'Etat, royal ou républicain, a édifié en France le cadre
politique et administratif de la nation. En revanche, il n'est pour
rien dans la formation de sa substance. Il n'est pas le créateur du
peuple français ni la source de son identité. Et cela, l'histoire
le démontre.
Reportons-nous
rapidement aux origines, précisément au Serment de Strasbourg,
publiquement prêté en février 842 par Charles de Chauve et Louis
le Germanique, petits-fils de Charlemagne. Le texte faisant foi fut
rédigé en roman (français ancien) et en tudesque. Il s'agit du
plus ancien document connu attestant une séparation linguistique
entre barons francs germanophones et francophones issus de la même
souche. Le Serment de Strasbourg est en quelque sorte l'acte de
naissance officiel des Français et des Allemands avant la France et
l'Allemagne. En ce IXe siècle, sans qu'il n'y ait jamais d'Etat
national, deux peuples frères différents sont déjà attestés par
l’autogenèse de deux langues distinctes.
Avançons
dans le temps. Dès les XIe et XIIe siècle, les preuves abondent
d'une spécificité française rayonnante en dehors de tout Etat
centralisé. La petite cour des roitelets de ce temps ne fut pour
rien dans la composition de la Chanson de Roland, de Tristan et
Iseult, ou du Perceval de Chrétien de Troyes, monuments primordiaux
d'une francité bien enracinée dans le socle européen. Le rôle de
l'Etat est tout aussi absent dans l'affirmation du style roman et
dans le foisonnement, aux siècles suivants, de l'admirable
architecture profane des châteaux, des villes et des maisons
rurales, répondant à des styles régionaux bien spécifiques :
l’architecture ancienne de Toulouse n’est pas celle du vieux
Rouen. Contrairement à ce qui a été mille fois rabâché par une
historiographie jacobine, la nation française ne fut pas une
création de l’État. Elle est née d’elle-même. C’est
pourquoi des abandons de souveraineté ne la mettraient pas en péril.
C’est au contraire l’État d’aujourd’hui, avec son arsenal de
lois immigrationnistes et destructrices de nos identités, qui met
celles-ci en danger de mort.
Ayant
à l’esprit ces réalités méconnues, il faut lire l’essai
rempli d’audace, d’imagination et de volonté de Gérard Dussouy,
professeur à l’université de Bordeaux, spécialiste des relations
internationales, auteur de nombreux ouvrages de géopolitique, esprit
à l’évidence identitaire et européen. Il se demande en effet si,
en refusant le choix de la supranationalité, la France n’est pas
devenue « le problème de l’Europe ». Narcissique, fanfaronne et
nostalgique de sa grandeur passée, vivant dans le souvenir souvent
faux de son histoire, la France s’imagine encore être une grande
nation toujours capable d’influencer le monde, alors que le monde
change sans elle depuis longtemps. Mais ces illusions auront une fin
d’autant que s’évapore le récit statocentré de l’histoire
française.
Petit
par le nombre de pages, le livre de Gérard Dussouy est grand par le
projet qu’il expose, l’ambition raisonnée qui le porte et
l’adhésion enthousiaste qu’il suscite. Son auteur est bien
conscient que, pour les Européens d’aujourd’hui, le scenario
annoncé est celui de la décadence. Mais il renverse ce scenario en
son contraire. « Si l’on est de ceux qui considèrent que seul le
défi est générateur de grandes œuvres », écrit-il hardiment,
les temps difficiles que l’on voit venir pourraient obliger les
Européens à commencer une nouvelle histoire et bâtir un nouvel
avenir en édifiant leur propre État au sein d’un grand espace
générateur de vigueur et de puissance.
On
a compris que Gérard Dussouy est de ceux qui considèrent que « le
défi est générateur de grandes œuvres » ! Quel défi ? Celui
d’une mort programmée de l’Europe. Quand l’auteur parle
d’Europe, il ne pense pas au cauchemar technocratique et
mondialiste de Bruxelles, mais à l’Europe des peuples, l’Europe
civilisation, née de la Grèce antique, de Rome et des peuples
frères, Celtes, Germains et Slaves, qui fécondèrent le
christianisme médiéval, la Renaissance, les Lumières et la
laïcité. L’Europe est cette « grande République » déjà
décrite par Voltaire en 1751 dans son introduction au Siècle de
Louis XIV, trente ans avant que l’Académie de Berlin n’ouvre un
concours sur l’universalité de la langue française…
Aujourd’hui
désunie, minée par des influences délétères, l’Europe
s’achemine à grande vitesse vers la dissolution de son ancienne
civilisation et la désintégration de ses nations, sous les effets
conjugués du vieillissement, de l’immigration et de la sclérose
économique. « Bien irresponsables ou naïfs sont ceux qui
s’imaginent que nos démocratie européennes pourront s’octroyer
toujours plus de facilités de vivre et de laxisme social dans le
cadre étriqué de nos États-nations ».
Gérard
Dussouy rappelle que les vieilles nations européennes sont menacées
dans leur existence par leur crise démographique et les effets d’une
immigration de masse, tandis que les États européens sont eux-mêmes
déclassés par les nouvelles puissances mondiales. Il serait
complètement illusoire de considérer l’impuissante Union de
Bruxelles comme un acteur capable de rivaliser avec la Chine, l’Inde,
le Japon, la Russie ou les Etats-Unis qui, chacun, sont des États
cohérents. Faute de ressources propres, on sait que les faibles
États européens sont dès maintenant contraints de céder des pans
entiers de leur économie nationale à des sociétés chinoises,
indiennes ou qataries.
Contrairement
à ce que prétendent les adorateurs de la mondialisation, un État
fort, incarnation de la puissance, ainsi que le grand espace étatique
demeurent les seuls vrais acteurs internationaux. Quand on a compris
cela, on comprend aussi que n’existera jamais un ensemble européen,
une puissance européenne capable de garantir la survie de ses
peuples et de ses nations culturelles, tant que n’existera pas un
authentique État européen identitaire, une robuste République
européenne de type fédéral recouvrant et protégeant la substance
des anciennes nations, instrument politique au service des peuples et
des citoyens européens de souche. Mais d’un tel but, nous sommes
loin !
Tout
se conjugue pour le moment contre l’édification d’un État
politique européen. Les mondialistes, inventeurs du système de
Bruxelles, se complaisent à penser un monde sans ennemi au sein
duquel leurs utopies démocratiques se diffuseraient grâce à un
marché planétaire qui ravage pourtant les sociétés européennes.
À l’opposé, les souverainistes nationaux s’enferment dans un
discours incantatoire qui ignore l’écart séparant la faiblesse
des anciennes nations et leurs intentions affichées. Pour être une
puissance, il ne suffit pas, sous contrôle américain, d’expédier
dans l’ex Françafrique une poignée de parachutistes équipés de
matériels épuisés, faire du maintien de l’ordre au profit des
multinationales. De leur côté, les mouvements populistes, engendrés
par le désarroi des populations face à d’insupportables
conditions de vie, s’enferment dans le repli illusoire du pré-carré
national et le refus de l’identité européenne.
Ce
serait donc à désespérer de tout si ne survenait l’imprévu d’un
« choc systémique » annoncé par Gérard Dussouy. Un choc causé
par une convergence de crises. Comme souvent, à toute chose malheur
est bon. L’auteur estime à bon droit que l’inéluctable choc
systémique que l’on voit venir aura le pouvoir de renverser les
images erronées qui nous submergent, en favorisant l’émergence
d’une conscience européenne, « une volonté communautaire de
survie et d’existence libre dans une même souveraineté »,
autrement dit l’émergence d’un européisme.
Les
temps difficiles qui attendent la pseudo Union européenne et les
Européens auront raison des institutions de Bruxelles. Mais ils
pourraient aussi obliger les Européens à plus d’unité. Sans un
État européen puissant, souligne Gérard Dussouy, sans une vraie
politique européenne, le Vieux continent, rongé par sa faiblesse
économique et démographique, perclus de fractures et de
dissentiments, serait voué à une mortelle marginalisation dans un
monde dominé par des puissantes géantes nullement philanthropiques.
La seule alternative au choc systémique qui s’annonce sera un
européisme capable de transcender les mouvements de rébellion et de
dissidence. N’ayant plus que leurs dettes souveraines à opposer
aux « fonds souverains » de l’Asie et du Moyen-Orient, nouveaux
décideurs de l’économie mondiale, les populations européennes
seront placées devant l’obligation de choix décisifs.
Gérard
Dussouy se dit convaincu que le péril entrainera une révision
brutale des « représentations » périmées. Selon lui, nos peuples
découvriront qu’il existe « une voie et une seule, celle de
l’État européen, souverain et identitaire. À l’épreuve des
faits, ils saisiront que l’idéologie universaliste qui sous-tend
leurs actuelles représentations du monde, les conduits à leur
perte. Par nécessité, ils dépasseront leurs ethnocentrismes
respectifs au profit de l’européisme ». Ayant cette perspective à
l’esprit, on peut espérer et agir. « À condition de réconcilier
les peuples avec le projet européen, d’articuler le local et le
communautaire, de se débarrasser des visions passéistes ou
nostalgiques aussi bien que de tout esprit de repentance, l’unité
de l’Europe est le seul moyen d’échapper à la résignation ».
L’existence
d’un État européen supposera bien entendu une armée
supranationale disposant d’un budget que seule pourra autoriser
l’Europe fédérée. Pour éviter tout malentendu, Gérard Dussouy
précise que ce projet militaire devra se faire en partenariat avec
la Russie. Seuls des liens très forts avec cette grande puissance
continentale offriront en effet à la nouvelle Europe le grand espace
et les ressources immenses indispensables à son existence.
En
formulant cet audacieux projet d’un État fédéral européen
partenaire de la Russie, l’auteur ne se dissimule pas les
obstacles. Il voit bien que le manque de communication entre les
peuples européens, tenus de s’en remettre à leurs partis
nationaux et aux fonctionnaires européens pour la conduite de leur
destinée, est le principal obstacle à la mise en forme d’une
réponse vraiment communautaire aux défis qui les assaillent. Mais,
il compte à juste titre sur le stress du « choc systémique » pour
favoriser l’émergence de mouvements citoyens européistes
aujourd’hui encore inconcevables. Il compte qu’une nouvelle
culture politique européenne envahira les partis politiques
eux-mêmes, en faisant naître une « avant-garde » européenne
capable de constituer un premier « noyau dur » auquel d’autres
viendront s’agréger. On peut suivre Gérard Dussouy dans cette
prospective audacieuse : « S’il doit exister des États pionniers
de la Res publica europensis, explique-t-il, ce ne sera pas parce que
cela était écrit, mais parce qu’à un moment donné, ces États
seront dirigés par des partisans de l’État européen ».
Autrement
dit, si l’on comprend bien Gérard Dussouy, les nouvelles réalités
géopolitiques et le choc systémique à venir feront apparaître,
face aux Autres, l’affirmation d’un Nous européen en séparant
de façon claire ce qui relève de l’intérieur (l’européen) et
de l’extérieur (l’international). Une authentique
supranationalité s’imposera alors comme une question de vie ou de
mort. Avec la création d’un État véritable, elle fera naître un
espace économique européen homogène et déconnecté du marché
mondial du travail.
Ainsi
que l’écrit Gérard Dussouy, le malaise social et identitaire qui
explique la forte poussée des nationaux-populistes à travers tout
le continent souligne paradoxalement la communauté de destin des
Européens. Au sein même de ces mouvements, se fera jour la
conscience qu’il faut s’unir si l’on ne veut pas disparaître.
La promotion de l’identité européenne, fondera une identité
recouvrante et non pas absorbante des identités antérieures. C’est
alors que pourra être fondée une République fédérale européenne
articulée sur l’authenticité des régions et l’effacement
volontaire des États nationaux. Cette future république n’a pas
de précédents historiques, sinon peut-être celui de la Suisse
multilingue. Elle aura pour vocation de préserver l’identité
culturelle des nations constitutives.
L’auteur
développe longuement sa réflexion sur ces questions, comme on le
verra en lisant ses stimulantes analyses et propositions. Suivant son
excellente et forte formule, « L’identité s’éprouvera comme
conscience et s’affirmera comme volonté ».
Dominique
Venner
Dominique
Venner est écrivain et historien. Il dirige La Nouvelle Rebue
d’Histoire. Parmi ses nombreux ouvrages, on peut retenir Histoire
et tradition des Européens. 30 000 ans d’identité (Le Rocher,
2004). Le Siècle de 1914 (Pygmalion, 2006). Et récemment, Le Choc
de l’Histoire (Via Romana, 2011).
***
EXTRAITS
L’Union
européenne, est à la dérive. La question commence à être posée
de sa fin possible, à travers les difficultés récurrentes de la
zone euro et l’inefficience de ses principaux rouages.
Le
repli sur ses vieilles nations serait-il pour autant la planche de
salut d’une expérience malheureuse et qui aurait tourné court
parce qu’elle allait à contre-sens de l’Histoire ? Certainement
pas, quand on constate que tous les pays européens présentent, à
des degrés divers, le même syndrome caractéristique des fins de
cycle civilisationnel.
Plus
que jamais, le seul recours est dans la construction de l’Etat
européen, par et pour les peuples d’Europe.
La
convergence des crises.
Alors
que l’histoire est entrée dans son âge planétaire et que des
transformations immenses sont entrain de se produire, les carences et
les impasses s’accumulent en Europe.
Avec l’aggravation probable de la récession, pour de multiples raisons (poids de la dette souveraine et de la fiscalité, vieillissement, anémie de la croissance, exacerbation de la concurrence internationale, déflation salariale), et à fortiori, en cas de passage à une dépression de longue durée (croissance négative et diminution du PIB), il est à prévoir bien des conflits politiques : luttes pour l’emploi et la répartition des revenus, révolte dans les banlieues contre les suppressions des aides sociales, conflits intergénérationnels sur les retraites et sur les impôts entre des populations d’origines ethniques différentes et de plus en plus revendicatives en termes de croyances, de règles de vie et d’organisation sociale.
Soit une période de tensions et d’affrontements, d’essence à la fois sociale et sociétale, qui pourrait concerner plusieurs générations. Tout cela risque fort de ressembler, à des degrés divers et selon des modalités différentes en fonction des pays européens, à une « guerre de Trente ans » mêlant enjeux politiques, sociaux, et religieux...
Avec l’aggravation probable de la récession, pour de multiples raisons (poids de la dette souveraine et de la fiscalité, vieillissement, anémie de la croissance, exacerbation de la concurrence internationale, déflation salariale), et à fortiori, en cas de passage à une dépression de longue durée (croissance négative et diminution du PIB), il est à prévoir bien des conflits politiques : luttes pour l’emploi et la répartition des revenus, révolte dans les banlieues contre les suppressions des aides sociales, conflits intergénérationnels sur les retraites et sur les impôts entre des populations d’origines ethniques différentes et de plus en plus revendicatives en termes de croyances, de règles de vie et d’organisation sociale.
Soit une période de tensions et d’affrontements, d’essence à la fois sociale et sociétale, qui pourrait concerner plusieurs générations. Tout cela risque fort de ressembler, à des degrés divers et selon des modalités différentes en fonction des pays européens, à une « guerre de Trente ans » mêlant enjeux politiques, sociaux, et religieux...
L’Europe
marginalisée.
Dans
le même temps, toutes les tendances actuelles confirment notre
hypothèse : le déplacement du centre de gravité mondial vers le
Grand Océan, c’est à dire l’espace maritime formé par la
réunion de l’océan Pacifique et de l’océan Indien ; tandis que
les grands espaces de puissance, en particulier ceux de l’Eurasie
de l’Est, deviennent les acteurs principaux de la politique
mondiale. Avec deux corollaires : la formation du duopole
Etats-Unis/Chine-Inde et la marginalisation en cours de l’Europe.
La crise ouverte en 2008 accélère ce changement radical.
La
nécessité vitale de l’État européen.
De
quels poids pèsent, et pèseront dans l’avenir, les différents
Etats européens face à l’Etat américain, à l’Etat chinois, à
l’Etat indien ? Comment les Européens peuvent-ils relever les
défis de la gouvernance mondiale, sans un centre de décision
politique unique ? En s’accrochant au dogme suranné de la «
souveraineté nationale », parce que dépassé par les réalités de
la puissance mondiale, ils ajoutent au « syndrome romain », qui les
affecte tous, le « syndrome byzantin », qui les rend
impuissants,bien que réunis. Si l’on entend par là, la somme des
conflits symboliques qui divisaient une Constantinople assiégée de
toutes parts.
Dépourvue
d’un véritable exécutif et de toute stratégie communautaire,
autre que celle imposée par l’Organisation Mondiale du Commerce,
et qui répond à la logique de la mondialisation, l’Union
européenne court après les événements, pare au plus pressé, mais
sans jamais rien anticiper. C’est un peu Blanche-Neige (c’est à
dire la Commission, qui rêve toujours, naïve, d’une
mondialisation heureuse) et les 28 nains (c’est à dire les États,
si on ajoute la Croatie) qui sont incapables de s’entendre et de
réagir promptement.
Quand
ils parviennent à arrêter une décision, c’est après un long
processus plein de raidissements capricieux et de raccommodages
miraculeux.
La
supranationalité est donc la question première. Car il n’existera
jamais « une Europe », puissance internationale garante de la
survie des nations culturelles qu’elle englobe, tant que n’existera
pas un Etat européen.
Face
à la situation de crise et face au durcissement à venir des
relations internationales, consécutivement aux réalités sociales,
démographiques, à la course à l’énergie, aux tensions
politico-culturelles de toutes sortes, les peuples européens doivent
se doter d’un Etat unique, volontariste et pragmatique.
«
Patriotisme géographique » et construction européenne.
La
construction européenne a été jusqu’à maintenant une
construction par le haut,c’est à dire par les Etats et grâce aux
traités qu’ils signent entre eux. Et l’explication convenue est
qu’il ne pouvait en être autrement à cause de l’ethnocentrisme
de chaque peuple. Pourtant, on peut croire à la possibilité d’une
construction par le bas, sous la forme d’une reprise de la marche
en avant à la demande de mouvements de citoyens convaincus que leur
prospérité, leur sécurité, et leur identité ne peuvent plus être
désormais garanties que par un puissant Etat européen. Mais,
pourquoi l’Europe, et surtout, pourquoi des mouvements citoyens se
lèveraient-ils en Europe ? Parce qu’à l’âge des menaces
globales, qui plonge tous les peuples européens, les uns après les
autres, dans une crise existentielle, tous sont proches, malgré une
histoire récente qui les a durement opposés entre eux, par leurs
origines anthropologiques et par leur passé civilisationnel. Dans la
« guerre sans guerre » si caractéristique de la nouvelle scène
internationale, pris isolément, les peuples européens sont tous
aussi démunis et vulnérables les uns que les autres. La géographie,
la culture et la civilisation les appellent à se rassembler, à se
solidariser. Seul un « patriotisme géographique » des Européens
est donc à même de relancer la construction européenne, parce que
sans renoncer aux identités anciennes, il affirmerait la volonté de
vivre ensemble des peuples et de faire valoir les héritages que tous
les membres du continent ont en commun.
Au terme « Etat
européen » utilisé dans le titre, j'eusse préféré le terme
« Empire européen » ou « Confédération
européenne », mais l'auteur critique ces deux termes, et lui préfère celui d'Etat. Peut importe. L'ouvrage de Gérard Dussouy a l'immense
mérite de nous faire découvrir une pensée originale et une vision
portée sur le long terme. L'ouvrage est structuré en deux grandes parties : le diagnostic (panorama très complet des forces en présence et à venir dans le monde), et les solutions (la solution, en fait, qui est "l'Etat européen"). Nous n'avons pas affaire ici à un écrit
farfelu ni à un pavé indigeste. L'ouvrage fait 179 pages, il est
accessible à tout un chacun. L'auteur, spécialiste reconnu de
géopolitique, est lucide (c'est-à-dire pessimiste) quant au devenir de la France et de l'Europe ; mais l' Histoire n'est jamais écrite, dit-il, nous laissant entrevoir une lueur d'espérance.
Gérard Dussouy parvient à synthétiser ses idées et à les exprimer dans un style clair et compréhensible par tous.
Quelques passages, dans lesquels se succèdent beaucoup de statistiques, comme ceux traitant de l'économie, sont un peu moins agréables à lire ; mais pour ce genre d'ouvrage, les démonstrations doivent évidemment s'appuyer sur des chiffres et des références.
J'aurais apprécié, aussi, que soit abordée le problème de l'immigration. Certes, l'auteur précise bien que l'Etat européen qu'il préconise n'a rien à voir avec une Europe cosmopolite. Mais il ne précise pas comment un "Etat européen" pourrait être plus efficace en matière de lutte contre l'immigration qu'un "Etat-nation".
Cet ouvrage reste toutefois un ouvrage de référence qu'il faut absolument lire car il ouvre des perspectives nouvelles. Il est regrettable qu'aucun parti politique d'envergure nationale n'existe pour porter cette vision d'une Europe des peuples qui semble être la seule solution pour affronter les défis du monde de demain.
Gérard Dussouy parvient à synthétiser ses idées et à les exprimer dans un style clair et compréhensible par tous.
Quelques passages, dans lesquels se succèdent beaucoup de statistiques, comme ceux traitant de l'économie, sont un peu moins agréables à lire ; mais pour ce genre d'ouvrage, les démonstrations doivent évidemment s'appuyer sur des chiffres et des références.
J'aurais apprécié, aussi, que soit abordée le problème de l'immigration. Certes, l'auteur précise bien que l'Etat européen qu'il préconise n'a rien à voir avec une Europe cosmopolite. Mais il ne précise pas comment un "Etat européen" pourrait être plus efficace en matière de lutte contre l'immigration qu'un "Etat-nation".
Cet ouvrage reste toutefois un ouvrage de référence qu'il faut absolument lire car il ouvre des perspectives nouvelles. Il est regrettable qu'aucun parti politique d'envergure nationale n'existe pour porter cette vision d'une Europe des peuples qui semble être la seule solution pour affronter les défis du monde de demain.
Je reproduis ci-dessous le
sommaire du livre.
Péface de Dominique
Venner
Introduction : Le
syndrome romain.
L'implosion des sociétés
européennes.
Le dépassement des
Etats-nation européens.
L'Etat européen pour ne
pas disparaître.
Chapitre 1 – La
convergence des crises en Europe.
La fin du Vieux Monde ?
Effondrement démographique et crise identitaire.
Le déclin industriel et
la crise de l'endettement.
Les crises sociétale et
politique : vers une « guerre de Trente ans » ?
Chapitre 2 – L'Europe
reléguée à la périphérie du nouveau monde.
Le nouveau règne des
Etats-continent.
La nouvelle carte du
monde.
L'Europe face à un
environnement international bouleversé et menaçant.
Chapitre 3 – L' Union
européenne sans frontières et sans cohésion.
La nouvelle Europe
continentale et ses frontières.
La Russie en Europe.
La cohésion territoriale
et sociale de l'Union.
Chapitre 4 – Le besoin
vital de l'Etat européen.
L'impuissance de la
gouvernance européenne.
L'accession à la
cohérence et à la puissance par la supranationalité.
L'Etat européen :
une fédération de régions.
L'Etat européen : un
grand espace de croissance équilibrée.
Chapitre 5 – Le choc
systémique et l'Européisme.
L'Européisme contre les
inhibitions idéologiques.
L'Européisme :
mobilisation sociale et stress extérieur.
Conclusion générale.